Chers lecteurs,
Cette newsletter Risques & Gouvernance est consacrée à la crise aiguë du Covid-19. Pour nombre de commentateurs et chercheurs, il y aura un avant et un après. Trois mois après le déferlement de la pandémie, s’il est ainsi acquis que le monde qui émergera de cette crise sera bien différent de celui qui l’a précédé, les incertitudes sur les risques qui vont être accentués par ou émergés de cette crise restent nombreuses. Néanmoins les articles et publications diverses soulignent également que cette période de mutation profonde est aussi l’occasion de rebattre les cartes et de créer ou saisir certaines opportunités.
Bonne lecture !
Covid-19 : le World Economic Forum planche sur les risques et opportunités du « monde d’après »
Le World Economic Forum a publié courant mai deux rapports dédiés aux risques et opportunités post crise. Le premier intitulé Covid-19 Risks outlook, publié en partenariat avec Marsh & Mac Lennan et Zurich Insurance Group, propose une cartographie des risques en sortie de crise, basée sur une enquête auprès de 350 professionnels de la gestion des risques. Sollicités pour évaluer 31 risques en termes de probabilité pour le monde, de degrés de préoccupation pour le monde et de criticité pour leur entreprise, ces professionnels ont exprimé des craintes en priorité sur des sujets économiques (récession mondiale prolongée, boom des faillites) mais également sociétaux ou technologiques.
Dans le second rapport intitulé Challenges and opportunities in the post-Covid-19 world, ce sont les membres du Global Risks Advisory Board qui ont été invités à se projeter et à imaginer quelles ouvertures et opportunités crée cette crise sanitaire pour la gestion de défis systémiques. A travers dix chapitres, chaque expert traite d’une thématique : commerce, gouvernance, société, santé, travail, technologie… Ce faisant, le rapport offre aux décideurs un tableau exhaustif des changements long terme possibles et fournit un cadre de réflexion pour tirer parti des opportunités que cette crise peut révéler.
Covid-19 : faut-il choisir entre santé publique et libertés fondamentales ? Le traçage et le suivi d’individus malades constituent la base de l’épidémiologie, il n’est donc pas étonnant qu’en pleine crise sanitaire, les technologues du monde entier se soient empressés de mettre au point des applications, des services ou encore des systèmes de recherche pour identifier des porteurs du virus et les personnes entrées en contact avec ces derniers. Nombreux pays tels que la Chine, le Qatar ou encore la Thaïlande expérimentent déjà ce type de technologies, plus ou moins intrusives. En France, la CNIL a mis du temps avant d’autoriser la mise en place d’un outil de traçage par crainte du non-respect de la protection des données personnelles et des dérapages possibles en termes de libertés individuelles et vie privée. En effet, beaucoup d’experts s’interrogent sur la possible instrumentalisation de ce type de technologies pour surveiller les populations au-delà du besoin légitime de la gestion de l’épidémie. Serait-on en train de vivre un scénario orwellien ? Le dilemme du traçage et de la liberté
Strategy Loop :cinq questions clés pour décider de sa stratégie post-Covid-19 Dans l’article que nous avons sélectionné, Julien Jourdan, professeur à l’Université Paris Dauphine, suggère aux organisations de s’appuyer sur l’analyse Strategy Loop pour surmonter une crise majeure comme celle que nous venons de traverser et pour mieux rebondir. L’analyse se décompose en cinq questions simples, mais essentielles auxquelles les entreprises doivent répondre pour évaluer et revoir leur stratégie : Dans quelle arène opérons-nous ? Quelle valeur unique apportons-nous ? Comment délivrons-nous une valeur unique ? Comment protégeons-nous notre position ? et enfin Quelle est notre trajectoire à long terme ? L’expert souligne que si la question de la stratégie peut parfois être abstraite, cette démarche permet au contraire aux organisations d’avoir une vision honnête et clinique de la réalité à laquelle elles sont confrontées et peut les accompagner concrètement dans les choix à opérer.
Découvrez l’intégralité de l’article ici :Cinq questions pour ré-évaluer la stratégie de votre entreprise pour l’après-Covid-19
Covid-19 : l’épreuve du feu pour la RSE D’après cet article, le Covid-19 aurait permis de tester l’engagement réel des entreprises en matière de RSE, mais également de confirmer la création de valeur d’un tel engagement. Sur la question de la réponse apportée par les entreprises, les consultants du Boston Consulting Group ont constaté que les organisations dotées d’une politique sociale forte et privilégiant le dialogue avec les parties prenantes, ont été plus rapides et plus coordonnées dans leurs agissements. D’autre part, les entreprises ayant placé la protection des salariés au cœur de leur préoccupation se sont mieux comportées sur les marchés. La question de l’utilité sociale s’est également concrétisée au travers d’initiatives telles que la mobilisation pour produire du gel hydroalcoolique (L’oréal) ou encore des masques (Decathlon), tandis que d’autres entreprises se sont essayées au partage de valeur (réduction de salaires ou dividendes pour certains dirigeants, reversement de profits liés au Covid-19 ou création d’un fonds en soutien à ses fournisseurs par Samsung). Se pose désormais la question de la résilience et de la capacité à maintenir une approche RSE globale dans l’après-crise. La crise du Covide-19 stress test grandeur nature de la RSE
Actualité gouvernance, réflexion et tendance
La crise du Covid-19 va-t-elle révolutionner notre façon de penser ? Dans cet article, Virginie Fauvel, directrice de la transformation et directrice pour la région Amériques du cabinet Euler Hermes, analyse les nouveaux modes de réflexion et de comportement que la crise du Covid-19 pourrait engendrer au sein de la société et des entreprises. Ainsi l’état d’urgence sanitaire a d’ores-et-déjà renforcé l’expression de solidarité individuelle, mais également institutionnelle. Plus inattendu peut-être, une union solidaire pour combattre le virus s’est également manifestée dans le monde des affaires : des entreprises pharmaceutiques concurrentes collaborent pour trouver un vaccin, des sociétés ont réorienté leur production pour fabriquer des masques, du gel hydroalcoolique…
Par ailleurs, le choc massif représenté par cette crise implique une profonde mutation au sein des entreprises qui doivent sans aucun doute renforcer leur capacité à innover, réévaluer leurs liens de dépendances avec leur écosystème ainsi que leur niveau de risque, voire repenser leur façon d’agir. Virginie Fauvel prône également un rapprochement entre entreprises et gouvernements pour accélérer l’adoption de normes communes, qu’elles soient environnementales, sociales ou de gouvernance. Le Covid-19 peut ouvrir la voie à d’autres façons d’agir et de penser en entreprise
Leçon de crise : les parties prenantes au cœur de la gouvernance De plus en plus d’entreprises s’efforcent de ne plus faire de la seule satisfaction des actionnaires une priorité absolue, mais au contraire de rendre l’entreprise responsable des effets qu’elle engendre sur la société. Un changement de vision qui trouve un écho particulier dans cette période de crise sanitaire hors normes. En effet, les récents événements ont mis la lumière sur l’importance des différentes parties prenantes des organisations et la relation de dépendance qui existe à leur égard. A la différence de la crise de 2008-2009, les organisations devraient saisir l’occasion pour se mobiliser et faire en sorte que conseil d’administration et équipes de direction ouvrent au maximum le champ de la réflexion quant à l’impact de leurs décisions sur les employés, les clients, les fournisseurs, la société ou encore les investisseurs. Gouvernance des entreprises : ne pas faire de cette crise un rendez-vous manqué
Vie post-crise : le télétravail, nouvelle normalité ? D’une exception le télétravail est-il en passe de devenir la norme ? S’étant imposé dans le cadre de la lutte contre la propagation de la pandémie, les entreprises en font maintenant le choix d’un mode de fonctionnement de longue durée. Ainsi par exemple, pour les salariés de PSA dont l’activité n’est pas directement liée à la production, la présence au bureau ne sera requise qu’une journée à une journée et demie par semaine. La direction RH a vu dans la crise sanitaire une occasion pour accélérer la transformation des modes de fonctionnement de l’entreprise. De l’autre côté de l’océan, le télétravail compte également de plus en plus d’adeptes. Avec des formules choc, Twitter a ainsi autorisé le télétravail « à vie » pour les employés dont le rôle et la situation le permettent, tandis qu’Alphabet – la maison mère de Google – a indiqué que le télétravail serait la nouvelle norme pour tout le monde aussi longtemps que possible. Pas moins de trois-quarts des DRH interrogés par leur association nationale prévoient ainsi un développement pérenne du télétravail. Avec la crise du coronavirus, les entreprises qui font du télétravail la règle se multiplient
Pour aller plus loin
Le tourisme, un secteur phénix du Covid-19 ? Un des secteurs les plus gravement et durablement touchés par la crise sanitaire est le tourisme : fermeture administrative et consommation des fonds propres pendant 3 mois ne pourront être compensés par un effet de rattrapage. A l’occasion de dispositifs dédiés mis en place par Bpifrance (un milliard d’euros de prêts tourisme à des conditions très avantageuses, formations à distance, autodiagnostics en ligne, programmes intensifs pour dirigeants…) son DG, Nicolas Dufourcq a souligné que s’il s’agissait bien entendu de soutenir des entreprises fragilisées, un des objectifs est également de réinventer le tourisme du futur qui aura une dimension digitale significative et qui devra être en capacité de répondre aux nouveaux modes de consommation (nouveaux concepts, logique d’économie circulaire…). La crise sanitaire, une opportunité pour « réinventer le tourisme du futur »